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Prudence en matière de trajectoire énergétique

Face aux incertitudes sur la trajectoire énergétique, la CFE Énergies appelle à la prudence et à éviter des paris risqués

Alors que le Président de la République tente de convaincre sur son projet de planification écologique et de franchir le mur de l’acceptabilité sociale, l’ensemble des acteurs du secteur énergétique font feu de tout bois pour influencer dans leurs intérêts les derniers arbitrages gouvernementaux de la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Compte tenu de la nouvelle situation géopolitique, la CFE Énergies considère que la sécurité des approvisionnements énergétiques comme les exigences de souveraineté, y compris industrielle, doivent constituer la boussole des arbitrages gouvernementaux, la ministre de l’Énergie ayant elle- même fait part, à plusieurs reprises, de son inquiétude quant au bouclage énergétique à l’horizon 2030.

Dans cette perspective, la CFE Énergies salue les travaux du dernier bilan prévisionnel de RTE qui viennent éclairer et objectiver les débats. Pour RTE, si « la grande bascule vers une société décarbonée » est un immense défi, elle suppose de mobiliser des leviers tels que l’efficacité énergétique, la sobriété et une accélération importante de la production d’énergie renouvelable (EnR).

Pour la CFE Énergies, si ces leviers font sens, les ambitions qui leur sont associées ne doivent pas reposer sur des hypothèses fragiles assises sur des promesses intenables. Les PPE précédentes ont en effet montré qu’elles ne se concrétisent que très rarement et surtout « n’engagent que ceux qui les croient ».

Ainsi, l’accélération très importante de la production électrique renouvelable visée par RTE liée à une croissance trop rapide d’ici à 2030 selon certains de la demande d’électricité, continue de poser une question fondamentale. Cette question est celle de la capacité du système électrique à gérer, à un coût socialement acceptable, les conséquences de l’intermittence, des risques de faible productible, des surcapacités régionales et de l’instabilité du réseau liée à une baisse de l’inertie, tous ces facteurs allant croissant. Cette accélération des EnR présente donc des limites qui posent la question du développement de moyens pilotables de production d’électricité pour suivre la hausse de la demande d’électricité.

Ensuite, la viabilité économique et même la possibilité physique de cette accélération sont questionnées par les tensions croissantes en matière d’approvisionnement en matériaux critiques, mais aussi par les grandes difficultés des industriels européens de l’éolien en mer face à la hausse de leurs coûts et aux goulets d’étranglement qui en résultent. De plus, l’acceptabilité citoyenne n’est aujourd’hui pas au rendez-vous et risque fort de ne pas s’améliorer avec la fuite en avant prônée par les promoteurs des EnR.

Ces facteurs sont d’ailleurs bien identifiés par la cour des Comptes européenne pour laquelle l’inflation pourrait ralentir le développement de l’éolien en mer. En outre, selon elle, une accélération trop volontariste risquerait de profiter à l’industrie extra-européenne. Cela s’est déjà produit pour les panneaux solaires dont les derniers producteurs européens poussent aujourd’hui un cri d’alarme face à la concurrence chinoise.

Par ailleurs, rien ne garantit que l’effort de sobriété constaté l’hiver dernier avec la flambée des prix se reproduise demain, surtout si les prix de l’électricité se détendent comme l’espère le Gouvernement. La pénurie subie n’est en rien une sobriété acceptée.

La sécurité énergétique ne saurait reposer sur des hypothèses pouvant apparaître comme des paris risqués. La CFE Énergies appelle donc le Gouvernement à faire preuve de la plus grande prudence dans la construction de sa programmation énergétique, et à mettre en place un pilotage précis et permanent des trajectoires.

Cette prudence est d’autant plus de mise, que si le système énergétique dispose aujourd’hui de peu de marges, c’est aussi parce que la fermeture de Fessenheim, dont l’impossible justification a reposé sur une sous-estimation orientée de la demande d’électricité, l’en a privé. C’est d’ailleurs la faiblesse de ces marges qui conduit aujourd’hui le Président de la République à reporter à 2027 la promesse déjà faite en 2017 de sortir de la production d’électricité à partir du charbon.

La CFE Énergies salue par conséquent la prudence aujourd’hui affichée par la ministre de l’Énergie qui vient de tracer les grandes lignes de la PPE. En « refusant de surpromettre et de décevoir ensuite » au regard notamment des écarts entre les promesses de la précédente PPE et la réalité, elle semble défendre une approche pragmatique et progressive en matière d’énergies renouvelables électriques, notamment éoliennes, qui conduit à des ambitions bien plus raisonnables que les demandes hors sol de la filière.

C’est d’ailleurs cette prudence qui, doublée du souci d’éviter une bombe sociale, a finalement conduit le Président de la République à ne pas souscrire à l’approche punitive d’une interdiction brutale des chaudières à gaz lors de leur renouvellement.

La CFE Énergies soutient enfin la volonté gouvernementale de prolonger l’ensemble du parc nucléaire existant, comme le recommande le directeur général de l’AIEA, d’engager la construction de nouveaux réacteurs et d’accélérer le développement des gaz renouvelables, ou encore de développer une puissante industrie française des pompes à chaleur.

Encore faut-il que tous les investissements induits par la future PPE, y compris de réseaux, soient financés. Au vu de la tournure actuelle des débats sur le prix de l’électricité, c’est tout sauf gagné !

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