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ENGIE : de nouveaux défis à relever – Lettre n°17

Une année plus que chahutée sur les marchés de l’énergie

Il n’aura échappé à personne que le début de l’hiver s’annonce froid. Des inquiétudes se font jour sur l’occurrence possible de délestages, malgré un remarquable effort collectif de sobriété énergétique, parfois au prix d’arrêts de production industrielle. Pour ce qui concerne le gaz, le niveau de nos stocks français est encore de 90 % ; sur l’hiver 22-23, cette situation conduit à un constat raisonnablement optimiste, mais sans résoudre toutefois la question de leur remplissage pour l’hiver 23-24 : une éventuelle reprise de l’économie chinoise au printemps prochain risquant de détourner l’offre de GNL au détriment de l’Europe.

Sur l’année écoulée, le Groupe ENGIE s’est attaché à diversifier ses approvisionnements, et à répondre à la volatilité des marchés ; celle-ci a pu être transformée en valeur grâce à l’activité de l’entité GEMS, en tant que gestionnaire de portefeuille, mais aussi en tant que manager du risque pour le compte des clients.

Sur le premier semestre 2022, le Groupe s’est dé risqué financièrement par rapport à ses contrats russes, tout en tirant les conséquences de la mise hors service des gazoducs Nord Stream 1 et 2 (dépréciations de titres et de prêt), et en arbitrant les écarts (spreads géographiques) sur les prix.

L’activité sur les marchés a demandé une forte réactivité des équipes qui gèrent les expositions à terme, mobilisant de fait de nombreuses liquidités (jusqu’à 2 milliards d’euros dans une même journée !) par le biais des appels de marges émanant des chambres de compensation. Le résultat de l’entité GEMS est analysé quotidiennement, et la « Value At Risk » des placements (approche probabiliste du risque) suivie en continu. En aval, le bouclier tarifaire, qui se traduit par une créance du Groupe sur les pouvoirs publics, a permis de limiter l’impact des hausses sur les clients particuliers du Business to Customer (BtoC). Des mesures d’aide aux clients les plus vulnérables ont aussi été prises.

Pour la CFE-CGC, le marché européen de l’énergie a néanmoins prouvé de manière éclatante ses limites et son incapacité à protéger les consommateurs finaux. Certes, il existe bien quelques « rustines » : comme la possibilité d’arbitrer sur les marchés à terme pour garantir un prix fixe, ou comme les contrats PPA (Power Purchase Agreements) qui permettent de contractualiser des prix de livraison sur le long terme avec des entreprises clientes (Business to Business), en particulier dans le domaine des renouvelables. Mais le constat est cruel : la doctrine européenne libérale, source d’un marché de l’énergie artificiel, n’épargne ni les producteurs qui assument le risque industriel, ni les consommateurs et citoyens qui, au travers de leurs factures ou de leurs impôts, encaissent le choc des prix. Cerise sur le gâteau, l’Europe a émis un règlement sur la taxation de la rente infra-marginale, décision qui se transpose par autant de dispositifs fiscaux nationaux différents que d’États membres ! Il faudra tirer les leçons de ce désastre.

Retour à la stratégie

L’activité quotidienne sur les marchés ne doit pas masquer l’exécution de la feuille de route stratégique. Pour le Groupe qui a réalisé l’essentiel de ses cessions sur les 2 dernières années, l’accent est aujourd’hui mis sur un développement des investissements de croissance, qui se traduit par une augmentation substantielle au regard des 3 exercices passés, dont le programme a pourtant été délivré. Ce changement de braquet s’accompagne d’un énième plan de performance sur lequel il faudra rester vigilant quant à ses effets, notamment sociaux. Les nouveaux investissements devraient produire rapidement du résultat, et le cash-flow opérationnel rapporté à la dette nette financière devrait rester à un niveau qui ne dégrade pas la note financière du Groupe.

Les investissements seront, pour leur grande majorité, consolidés, et consistent essentiellement en des opérations « greenfield » (peu d’acquisitions, au final). Il n’en demeure pas moins qu’en termes de résultat opérationnel, l’année 2023 doit se situer légèrement en deçà de l’excellent exercice 2022, en raison des dispositifs de « taxation des surprofits » mis en œuvre un peu partout sur le continent européen.

Le nucléaire : des défis en univers incertain

Le nucléaire en Belgique a affiché une très bonne disponibilité au cours des deux dernières années et a contribué aux bons résultats du Groupe. Progressivement et comme programmé, les différents réacteurs sont ou seront mis à l’arrêt définitif d’ici à 2025, à l’exception des tranches de Doel 4 et de Tihange 3, pour lesquelles la question de leur éventuelle prolongation de 10 années reste encore ouvertement en discussion avec le gouvernent belge.

Par ailleurs, ENGIE enregistre des provisions pour le démantèlement des réacteurs et pour l’aval du cycle du combustible usé. Le financement de ces provisions dans des réceptacles composés d’actions et d’obligations prépare le financement des dépenses futures de post-exploitation. Or, le montant des provisions est soumis à une réévaluation triennale, et la traduction de cette actualisation en investissements financiers pèse sur l’équation cash du Groupe, comme n’importe quel autre investissement. ENGIE est en discussion avec l’État belge sur l’ensemble de ces questions, à laquelle s’ajoute le problème de l’indispensable manœuvrabilité des actifs industriels et du cash logés dans sa filiale Electrabel. L’équilibre énergétique belge est aussi une donnée essentielle de ces discussions entre entreprise et gouvernement. Rappelons qu’ENGIE construit par ailleurs une centrale CCGT sur le site des Awirs.

Engie & Me : des points d’attention

Le corps social d’ENGIE s’est exprimé, avec un bon taux de participation, à l’occasion de l’enquête Engie & Me. Le retour général est satisfaisant sur l’adhésion à la stratégie, mais le taux d’engagement durable des salariés du Corporate et de la France est toutefois en retrait par rapport aux autres entités géographiques opérationnelles.

Pour le CFE-CGC, un point de vigilance tout particulier doit être porté sur l’aspiration des salariés à développer des parcours professionnels visibles et attractifs.

Actionnariat salarié : plan LINK

Le nouveau plan LINK d’actionnariat salarial a recueilli un très bon succès, signe tangible d’une certaine confiance des salariés dans l’avenir de leur Groupe.

La CFE-CGC se félicite pour ce résultat, d’autant qu’elle a toujours milité pour le développement de l’actionnariat salarié. Elle milite dès à présent pour améliorer les prochaines offres (dès 2024) afin d’encourager davantage la participation des salariés.

Rendez-vous en février pour les comptes annuels et le point sur le groupe de travail de la CRE concernant les infrastructures gazières.

 

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