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AUTONOMIE STRATÉGIQUE ET HYDROGÈNE

La Commission européenne doit défendre l’autonomie stratégique de l’Europe que certains États mettent à mal

Il y a quelques semaines, un des premiers défenseurs de l’autonomie stratégique européenne, le commissaire européen Thierry BRETON, s’élevait contre l’égoïsme du plan de 200 Mds€ de soutien à son économie engagé par l’Allemagne sans aucune concertation avec ses partenaires européens et au mépris des règles en matière d’aides d’État.

A nouveau, il vient de s’étonner du cavalier seul du chancelier allemand qui s’est rendu en Chine pour défendre les intérêts de son industrie, et de la volonté allemande d’accepter une entrée massive des Chinois dans la gestion du port de Hambourg. S’ils sont des cibles prioritaires pour le projet chinois des Routes de la Soie, les ports européens sont tout autant, au même titre que les infrastructures énergétiques, des infrastructures critiques pour l’autonomie stratégique du Vieux Continent, érigée en priorité pour l’avenir de l’Europe avec les crises du COVID puis russo-ukrainienne.

Le commissaire européen appelle ainsi l’Europe à parler d’une seule voix face à un pays qualifié de « rival systémique » pour rester maître de son destin dans un monde plus que jamais marqué par le retour des rapports de force géopolitiques et économiques, ce que le ministre allemand des Finances vient d’admettre avec son collègue français lorsqu’il dénonce le très controversé « Inflation reduction act » américain parce que relevant d’un protectionnisme vert explicite.

Dans le même temps, dans le secteur vital de l’énergie, la Pologne vient de choisir les offres américaines et coréennes pour son programme électronucléaire au détriment de l’offre française et donc européenne. Le secrétaire d’État américain Anthony Blinken n’a d’ailleurs pas manqué de souligner que « les États-Unis sont fiers d’être le partenaire fort de la Pologne pour l’énergie et la sécurité ». La CFE Énergies ne peut que regretter une décision qui met elle-aussi à mal l’idée d’autonomie stratégique européenne, et semble oublier les 86 milliards de fonds européens dont la Pologne a bénéficié entre 2004 et 2018.

Aussi, face à ces décisions et alors que l’Union européenne est confrontée à une crise sans précédent au moment même où le monde fait face à l’urgence climatique à en croire l’ONU qui évoque un « chaos climatique », la CFE Énergies appelle la Commission à redoubler d’efforts pour défendre l’autonomie stratégique de l’Europe, et en particulier dans un secteur aussi vital que l’énergie. Les débats sur l’hydrogène, considéré comme une des briques de la décarbonation de l’économie, lui en offrent aujourd’hui l’occasion.

Au moment où la Commission déploie, comme premier volet de sa stratégie hydrogène, une banque dotée de 3 milliards d’euros, la CFE Énergies lui demande non seulement de rendre sa démarche cohérente avec l’exigence d’autonomie stratégique mais aussi de la faire reposer sur un modèle économique viable non dopé aux subventions comme sur un modèle environnemental exemplaire sur toute la chaîne de valeur, qu’il s’agisse des émissions de CO2 ou des interactions avec la couche d’ozone.

C’est pourquoi la Commission doit refuser l’approche retenue par les eurodéputés qui ont, lors de la révision de la directive sur les énergies renouvelables, décidé d’exonérer les importations extra-européennes d’hydrogène de critères de durabilité.

Cette approche risque en effet de favoriser les importations d’hydrogène carboné, et donc d’accroître la dépendance de l’Europe aux pays tiers, mettant ainsi à mal son objectif de neutralité carbone et de maîtrise de son empreinte carbone, sans même parler du rendement énergétique global et de la responsabilité sociale de telles importations. Surtout, ce n’est pas parce que l’industrie allemande envisager de remplacer les importations de gaz russe par des importations d’hydrogène, comme en atteste le partenariat que vient de nouer l’Allemagne avec le Canada, pourtant grand producteur d’énergies fossiles, que l’Europe doit suivre cette unique voie.

Dès lors, toujours au nom de cette autonomie stratégique, la CFE Énergies demande à l’exécutif européen de qualifier de durable l’hydrogène produit en Europe à partir du nucléaire. Ainsi la stratégie hydrogène européenne sera la plus autonome possible, conforme à la taxonomie officialisée cet été et respectueuse des principes de subsidiarité et de neutralité technologique bas carbone.

50 ans après le rapport Meadows et en pleine COP 27, ce n’est pas en affaiblissant son autonomie stratégique ou en fragilisant son action climatique que l’Europe gagnera la bataille du climat !

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