Le B.A.BA de l’ARENH
Suite aux décisions gouvernementales censées limiter l’augmentation des TRV* à 4 % , l’Alliance CFE UNSA Énergies propose quelques clés de lecture.
L’ARENH, qu’est-ce que c’est ?
L’Accès Régulé à l’électricité Nucléaire Historique est un dispositif instauré par une loi de décembre 2010 et qui est censé se terminer en 2025. Il permet aux fournisseurs de s’approvisionner en électricité nucléaire produite par les centrales nucléaires du parc historique d’EDF, à un prix régulé et pour des volumes déterminés par le régulateur en fonction de la consommation de leur portefeuille de clients.
Le volume global maximal d’électricité cédé par EDF dans le cadre de l’ARENH est fixé par un arrêté. Il est actuellement de 100 TWh par an, soit environ 25% du volume d’électricité produit par le parc nucléaire. Le prix de vente était de 40€/MWh en 2011, puis est passé à 42€/MWh au 1 janvier 2012. Depuis, il n’a jamais été réévalué, malgré l’inflation.
Les bénéficiaires sont donc les concurrents d’EDF. En contrepartie, ils auraient dû et doivent encore investir dans leurs propres moyens de production.
Comment ça fonctionne au regard du marché de l’énergie ?
Les concurrents n’ont pas l’obligation de recourir à l’ARENH. Ils peuvent s’approvisionner sur le marché de gros quand les prix sont plus favorables que le prix de l’ARENH, ou au prix de l’ARENH quand c’est le contraire. EDF est donc toujours perdant dans ce dispositif.
Les prix de marché de l’électricité sont corrélés à ceux du charbon et du gaz qui constituent une source de production électrique importante en Europe. Ces derniers sont entraînés par les prix mondiaux du pétrole et du gaz, actuellement élevés pour des raisons géopolitiques et de reprise économique post-Covid. Par ailleurs, le prix du CO2 a augmenté, entraînant les prix de l’électricité également à la hausse. Dans ce contexte, les concurrents veulent davantage de volume au prix ARENH, plus avantageux pour eux.
Le dispositif ARENH étant limité jusqu’ici à 100 TWh, que la demande cumulée est supérieure, les concurrents sont servis au prorata et doivent acquérir ce qui leur manque au prix du marché (donc plus cher).
Quel rapport avec la décision de l’Etat ?
Afin de limiter l’augmentation des TRV à 4 % alors qu’ils devaient augmenter en février de plus de 40 %, le Gouvernement utilise :
- La baisse de la taxe « TICFE** » ramenée de 22€ à 0,5€/MWh selon les ministres (ou à 1€/MWh selon la CRE)
- L’augmentation du volume d’ARENH mis à disposition par EDF aux concurrents, qui passe de 100 TWh à 120TWh. Les 20 TWh supplémentaires seront vendus au prix de 46,2€/MWh.
Quelles conséquences pour EDF ?
Elles sont nombreuses !
La baisse de l’EBITDA générant sans doute en fin d’année un résultat négatif. Il n’y aura donc plus de bénéfices ni de dividendes à verser à l’Etat ou aux actionnaires.
Cette baisse de l’EBITDA déclenche la dégradation du ratio financier dette / EBITDA regardé par les banques et les marchés financiers, donc une dégradation de la note attribuée par les agences de notation financière.
Cette dégradation de notre notation financière génère une hausse du coût du crédit pour EDF et potentiellement une baisse du nombre de prêteurs. Les sources de financement vont donc se raréfier. Moins de financement, égale une incapacité à financer nos investissements indispensables tels que le grand carénage, l’EPR2 et la transition énergétique…
Pour assainir son bilan, EDF devra donc réaliser de nouvelles cessions et mener une politique d’austérité interne. Aujourd’hui, l’entreprise s’en défend, mais demain ?
Toute ces mesures entraînent un risque important d’un démantèlement du Groupe EDF tel que nous le connaissons aujourd’hui. HERCULE 2, le retour ?
Ces mesures sont présentes uniquement pour donner aux concurrents d’EDF les moyens de nous concurrencer alors qu’ils n’ont globalement pas rempli depuis 2011 leurs obligations de construire ou d’acquérir des moyens de production leur permettant de servir leurs propres clients !
Quelle pérennité pour ce système ? Que se passera-t-il courant 2022 ou en 2023 ? Quand ce n’est pas le consommateur qui paie, c’est le contribuable qui trinque. Si on voulait tuer EDF, on ne s’y prendrait pas autrement !
*TRV : Tarifs réglementés de vente
**TICFE : Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité