Nouvelle Commission Européenne : pragmatisme et action !
Face à la brutalité des rapports de force économiques qui vont désormais opposer l’Union Européenne (UE) aux États-Unis, à la Chine et à la Russie, la CFE Énergies considère que l’heure n’est plus à l’ambiguïté, ni la naïveté stratégique, ni aux bisbilles intereuropéennes et encore moins aux postures idéologiques, mais au pragmatisme et à l’action.
Dans les technologies de la transition énergétique, l’Europe est prise en étau entre le protectionnisme américain de l’Inflation Reduction Act et le leadership industriel chinois. La CFE Énergies défend donc que plus de pragmatisme européen, c’est d’abord mettre fin à l’idée que ce sont les règlements décidés par les fonctionnaires européens qui doivent décider a priori des technologies propres à privilégier et à soutenir.
Ce pragmatisme, c’est aussi laisser davantage de marges de manœuvre aux États-Membres pour choisir leur bouquet technologique et énergétique bas-carbone, en fonction de leur contexte géographique et industriel et dans le respect du Traité Euratom. C’est enfin laisser les entreprises choisir les meilleures technologies, selon les principes de rationalité scientifique, technique et économique, pour réduire les émissions de CO2.
En d’autres termes, la CFE Énergies défend pour l’avenir énergétique de l’Europe un crédo en trois axes : neutralité technologique, principe de subsidiarité et respect des traités. « Unis dans la diversité » doit être plus qu’une simple phrase pour devenir une vraie devise.
Or, si la nouvelle Commission européenne a été adoubée par le Parlement européen et a donc pu entrer en fonction le 1ᵉʳ décembre, elle n’a recueilli que 370 voix sur 688 auprès des eurodéputés. Avec une légitimité politique écornée avec le soutien parlementaire le plus faible depuis 30 ans, elle a plus que jamais le devoir d’agir pour le bien de tous les Européens.
La Présidente de la Commission doit donc être plus à l’écoute des acteurs de la société européenne, et en premier lieu des partenaires sociaux. Elle se doit de faire preuve de davantage de pragmatisme, dans l’intérêt des citoyens européens. La nomination à ses côtés d’un ardent idéologue antinucléaire belge comme conseiller sur les objectifs climatiques du Green Deal nous oblige malheureusement à être sur nos gardes.
Le contexte dans lequel évolue la Commission est aussi complexe que figé. D’un côté, les ministres européens de l’Industrie, réunis à Budapest lors du dernier Conseil compétitivité de l’UE, n’ont pas réussi à s’entendre sur un texte défendant « l’engagement de l’Union Européenne à agir pour garantir sa compétitivité à long terme, son leadership au niveau mondial et pour renforcer sa souveraineté stratégique » en dépit d’un moment géopolitique dangereux pour les intérêts européens.
Malgré les préconisations de Mario Draghi et les avancées du Net Zero Industry Act ou de la taxonomie sur la neutralité technologique bas-carbone, ces ministres n’ont pas réussi à faire référence aux enjeux majeurs liés aux technologies propres. Et pour cause : ils subissent la pression intransigeante de l’Allemagne et de l’Autriche qui ont refusé toute référence à la neutralité technologique de peur qu’elle puisse ouvrir la porte des financements européens à des technologies qui ne seraient pas soutenues par l’ensemble des États-Membres, et donc au nucléaire.
On peut reconnaître aux gouvernements européens opposés à l’énergie nucléaire leur ténacité pour imposer le modèle de l’Energiewende. Mais la France et les autres pays européens ont le droit, voire le devoir de ne pas laisser cette ténacité devenir dangereuse témérité pour l’économie, la souveraineté et même le climat de l’ensemble de la Communauté européenne.
En effet, tout opposés qu’ils sont à la neutralité technologique quand il s’agit du nucléaire, les Allemands n’ont aucun problème à revendiquer la neutralité technologique quand il s’agit de défendre leur industrie automobile. Ni à faire du développement des énergies renouvelables le cache-misère de la poursuite de leur utilisation du lignite, pourtant très fortement émettrice de CO2, de particules fines et un vrai fléau pour l’environnement, une des faces sombres de l’Energiewende.
Pour relever le défi de la compétitivité énergétique, comme le réclame à juste titre la nouvelle Commission européenne, les dirigeants européens doivent établir un bilan sans concession des différentes politiques énergétiques à travers l’Europe qui n’ont pas amélioré la sécurité d’approvisionnement et qui ont fait exploser les prix de l’énergie, comme ceux d’électricité en Allemagne lors des épisodes de « Dunkelflaute »… et passer du dogmatisme au bon sens.
C’est pourquoi la CFE Énergies appelle le nouveau Commissaire européen à l’énergie à exiger de sa Direction Générale de l’énergie qu’elle cesse de se focaliser sur la seule dimension verte de la stratégie énergétique européenne, ne serait-ce que pour éviter d’exposer l’UE à de nouvelles dépendances à l’égard de la Chine ou suivre les engagements pris par le candidat commissaire auprès des eurodéputés sur la neutralité technologique. Elle appelle tout autant la nouvelle Vice-Présidente espagnole de la Commission européenne en charge de la Direction Générale de la concurrence d’agir en réelle avocate de l’économie européenne et des emplois des Européens. Elle doit abandonner une conception éculée des règles européennes de la concurrence pour tenir compte des guerres économiques que se livrent les « grands empires » américain, chinois et russe sur le dos des Européens. Car il en va de l’avenir des emplois et donc de la prospérité en Europe !